John Walter, directeur général du Conseil canadien des normes (CCN), a été nommé à la vice-présidence (questions de politique) de l’Organisation internationale de normalisation (ISO), mandat qu’il assume depuis le 1er janvier 2014 pour la période 2014-2015. Sa nomination a été annoncée le 19 septembre 2013 lors de la 36e Assemblée générale de l’ISO, à Saint-Pétersbourg, en Russie, devant les représentants de plus de 120 pays. M. Walter remplace M. Sadao Takeda à ce poste.
Dans le présent article, John Walter décrit sa nouvelle fonction à l’ISO et son influence sur la normalisation au Canada et à l’international.
Comment votre expérience et votre expertise, ainsi que votre fort engagement à l’égard du renforcement de la normalisation, vous aident-ils dans votre nouvelle fonction à l’ISO, et que vont en retirer les Canadiens et les citoyens du monde?
J’ai occupé plusieurs postes de direction au sein du réseau canadien de normalisation, notamment dans le Groupe CSA, à la Technical Standards & Safety Authority de l’Ontario, à la division des Normes techniques au ministère de la Consommation et du Commerce de l’Ontario, et, depuis 2009, au CCN en tant que directeur général. Grâce à toutes ces expériences, j’ai une meilleure perspective et j’ai approfondi ma compréhension des points de vue et des besoins des intervenants qui utilisent le système de normalisation et des problèmes auxquels ils sont confrontés. Cela s’applique à mon rôle actuel de chef de file du réseau canadien de normalisation et de directeur de l’organisme d’accréditation national du Canada, ainsi qu’à mes anciennes fonctions de fournisseur, de régulateur et de client.
Pendant tout ce temps, j’ai participé à divers comités de normalisation internationaux, régionaux et nationaux. Grâce à cette combinaison de connaissances et d’expériences, j’aiderai les utilisateurs du monde entier à retirer plus de bénéfices de la normalisation. Je compte prendre en considération l’influence de mes prises de décision à l’ISO sur tous les utilisateurs du système international et ses contributeurs. J’ai le sentiment que mon expérience passée de coordonnateur de priorités nationales se transposera bien sur le plan international. Tout au long de ma carrière, j’ai pris part au rôle exercé par le Canada dans les questions relatives à l’Organisation mondiale du commerce (OMC) et j’ai bien conscience que nous devons tirer parti des normes ISO pour réduire les obstacles techniques au commerce. Mon expérience dans la consolidation du réseau de normalisation canadien m’aidera également dans mes fonctions à l’ISO. J’ai contribué à la création d’un large éventail de solutions de normalisation pour aider les gouvernements, l’industrie et les groupes de consommateurs à répondre à des enjeux du marché et sectoriels précis ainsi qu’à élargir l’accès au marché pour l’industrie, à la fois sur le plan national et international.
Donnez-nous un aperçu des principales priorités sur lesquelles l’ISO mettra l’accent au cours des cinq prochaines années.
En s’appuyant sur une base solide, l’ISO doit définir clairement ce qu’elle veut être d’ici 2020. Pour ce faire, elle doit, d’abord et avant tout, veiller en permanence à la concordance entre son programme et les questions de fond actuelles et à venir sur les plans social, environnemental, technologique, économique et politique. L’organisation doit se doter d’une stratégie pour veiller à cibler les bons secteurs de l’industrie qui ont besoin de solutions de normalisation tout en répondant mieux aux besoins du marché international. Au cours des prochaines années, l’ISO s’attachera également à aider les pays émergents et en développement à conforter leur économie grâce à une utilisation plus efficace des normes internationales. Enfin, l’ISO doit élaborer une stratégie pour attirer et fidéliser les experts techniques volontaires les meilleurs possible afin de bénéficier de leurs précieuses contributions pour un système de normalisation solide.
Y a-t-il un enjeu clé sur lequel vous pensez que l’ISO devrait se concentrer et pour lequel vous avez accumulé des connaissances et de l’expérience?
L’élimination des doubles emplois dans les normes et la promotion de l’harmonisation des normes. Par exemple, tout écart entre les normes des différentes réglementations nationales peut finir par entraver l’arrivée d’un produit sur le marché, et ce, même si ces normes visent à faciliter l’utilisation dudit produit. Au CCN, nous avons pris des mesures avec les organismes d’élaboration de normes (OEN) titulaires de notre accréditation pour éliminer les doubles emplois dans le système canadien. Tout d’abord, à l’automne dernier, le CCN a créé un système centralisé de notification hébergé sur son site Web qui contient les avis d’intention pour les nouveaux projets ainsi qu’un répertoire des normes publiées, qui a vu le jour grâce à la collaboration et à la participation de chacun des OEN du Canada. Ce système fournit à tous les acteurs du réseau et au grand public un point d’accès central à l’information sur les activités d’élaboration de normes au pays.
Le CCN ainsi que les autres organismes de normalisation dans le monde doivent désormais partager l’expérience acquise dans l’élimination des doubles emplois dans les normes avec les gouvernements et les organismes du monde entier qui s’efforcent d’établir un suivi de la politique de réglementation et de la gouvernance. Il est essentiel de progresser de plus en plus vers l’harmonisation des normes, car les gouvernements du monde entier voient dans les normes et l’accréditation un moyen d’accroître leur avantage concurrentiel. La redondance des exigences réglementaires porte préjudice aux exportations, et c’est le consommateur qui en paie le prix. Au chapitre de l’accréditation, le CCN a signé un certain nombre d’Accords de reconnaissance multilatérale (AML) qui, par exemple, sont susceptibles de réduire le délai de lancement et de diminuer les obstacles éventuels au commerce. Les AML sont des accords volontaires entre des organismes d’accréditation qui reposent sur la reconnaissance d’une équivalence technique entre les signataires. Ces AML volontaires favorisent une plus grande harmonisation et reconnaissance des normes et des systèmes de conformité, et pourraient diminuer la répétition des essais et des certifications. Il nous faut désormais transposer de plus en plus tout ce travail sur la scène internationale. Les autres pays peuvent utiliser ces solutions de normalisation comme points de référence ou comme modèles pour faire face aux enjeux réglementaires et lever les barrières qui engendrent des coûts.
Comment l’industrie canadienne peut-elle tirer parti de votre participation au processus décisionnel de l’ISO?
J’espère que ma fonction de vice-président (questions de politique) de l’ISO incitera l’industrie canadienne à représenter ses intérêts dans les réunions des comités techniques de l’ISO. Le rôle joué par le CCN dans l’élaboration de normes internationales augmente le niveau de compétitivité mondiale de notre pays, garantit notre santé et notre sécurité, et augmente notre niveau de vie général. Il nous protège aussi des obstacles présents dans la chaîne d’approvisionnement mondiale. Alors que nous continuons d’avancer dans notre processus d’harmonisation des normes entre les pays, il est de plus en plus important pour le Canada d’être présent à la table de discussion. Notre contribution aidera à garantir que les besoins, les exigences et les attributs des produits des fabricants canadiens, de même que les besoins des consommateurs canadiens, seront pris en considération lors de l’élaboration de normes internationales. Soixante-dix pour cent des normes ISO sont adoptées et utilisées au Canada, sans subir de modifications.
Plus il est facile pour les organismes canadiens de se conformer aux exigences, aux lignes directrices et aux règles édictées dans les nouvelles normes internationales, plus grandes sont leurs possibilités d’exploiter de nouveaux marchés internationaux, de développer leurs activités et d’augmenter leurs revenus. Si les entreprises canadiennes n’adoptent pas les normes, elles resteront à la traîne, car les portes de certaines parties du monde pourraient leur demeurer fermées. C’est un scénario plausible vu le niveau de plus en plus élevé de compétitivité et de complexité dans les chaînes d’approvisionnement internationales, notamment en ce qui concerne les exigences légales et techniques, et le nombre croissant d’organisations qui ont des unités de production dans plusieurs pays étrangers tout en intervenant sur plusieurs marchés.
En vous projetant, quelles possibilités entrevoyez-vous au sein de l’ISO pour renforcer la normalisation internationale?
Comme nous nous dirigeons vers une plus grande harmonisation des normes à l’échelle internationale, nous avons de moins en moins besoin de normes spécifiques à un pays donné. Dans des domaines tels que les technologies émergentes, il est important que les pays exercent une forte influence dans les forums de normalisation internationale afin d’influencer les débats portant sur des questions d’intérêt public et sur l’élaboration de normes internationales, ou, tout du moins, pour ne pas empêcher ces pays d’exercer leurs activités dans le reste du monde. L’ISO doit veiller à ce que tous ses pays membres participent à ces forums et qu’on leur fasse prendre conscience de la portée vitale de leur participation sur la santé, la sécurité et la prospérité économique des citoyens. Il faut que chaque pays soit entendu de l’ISO. Puis, en réponse, nous devons entrer immédiatement en action et mettre en œuvre des mesures claires pour que, ensemble, nous soyons à même de faire face aux enjeux qui nous affectent tous.
Les Normes internationales de l’ISO sont garantes de la sécurité, de la fiabilité et de la qualité d’un produit et d’un service. Les normes aident les organismes à diminuer leurs coûts en réduisant au maximum le gaspillage et les erreurs, et en augmentant leur productivité, et les aident à faire leur entrée dans de nouveaux marchés. En ce qui concerne les pays en développement, les normes créent des règles du jeu équitables en permettant un libre-échange mondial et juste. Les normes ISO sont créées par des personnes qui en ont besoin au moyen d’un consensus. Des experts du monde entier élaborent les normes dont leur secteur a besoin. Il faut impérativement que le mandat de l’ISO et son rôle restent pertinents et axés sur les bonnes questions qui apportent des retombées positives, qui soutiennent les approches innovatrices et qui, en fin de compte, servent correctement les intérêts des utilisateurs de normes. Ceci étant dit, il est primordial de veiller à ce que le nombre de participants à l’élaboration des normes ne diminue pas. Au cours de ces quelques dernières années, de moins en moins d’intervenants gouvernementaux et de représentants de l’industrie et du monde universitaire sont en mesure de participer à des rencontres de normalisation en raison, souvent, de contraintes financières des organisations ou des départs en retraite des experts chevronnés sans qu’ils soient remplacés. De plus, les nouveaux experts du secteur des technologies émergentes ne disposent pas toujours des ressources nécessaires pour siéger à ces comités. Ce besoin ne pourra que grossir étant donné que l’utilisation des normes est de plus en plus un préalable au commerce mondial.
Pour en apprendre plus sur les fonctions de John Walter en tant que vice-président (questions de politique) de l’ISO, suivez le CCN sur LinkedIn, sur Twitter @NormesCanada, et sur Facebook.